Lignum Holzwirtschaft Schweiz

Marchés publics: Nouveautés et conseils aux entrepreneurs bois

La nouvelle loi fédérale sur les marchés publics est entrée en vigueur avec un objectif ambitieux, celui de passer d’une concurrence basée uniquement sur le prix vers une concurrence basée sur la qualité. Cette nouvelle orientation est essentielle pour le secteur de la construction. C’est maintenant aux entreprises de s’approprier concrètement ces dispositions.

Bâtiment de la police cantonale fribourgeoise réalisé en bois du canton de Fribourg.
Image Corinne Cuendet / Lignum


De quoi s’agit-il ?
La loi fédérale sur les marchés publics [LMP] et l’accord intercantonal sur les marchés publics [AIMP] constituent les bases légales auxquelles sont soumis les marchés passés par des adjudicateurs « publics » ou assurant un « service public ».

Il s’agit de la Confédération, des cantons et des communes, mais également d’autres entités contrôlées par les pouvoirs publics et exécutant des tâches publiques.
Il peut s’agir de marchés de travaux de construction, de fournitures ou de services. Les dernières révisions de l’AIMP et de la LMP qui est entrée en vigueur au 1er janvier 2021, apportent une harmonisation des conditions-cadres régulant les marchés
publics, soumis ou non aux accords internationaux, ce qui facilite leur application.


Comment cela fonctionne-t-il ?
Des procédures d’attribution du marché sont fixées selon des seuils basés sur la valeur totale des travaux nécessaires à sa réalisation, respectivement sur la valeur de chacun. Les valeurs seuils sont publiées régulièrement en annexes à la LMP et à l’AIMP.

Dans un premier temps, il convient de déterminer si un marché est soumis aux accords internationaux ou non. Pour l’exemple de la construction, c’est la valeur additionnée des travaux nécessaires à la réalisation d’un ouvrage qui est considérée pour le déterminer.

Lorsque le montant total déterminant atteint la limite d’application des accords internationaux, l’appel d’offre est obligatoirement effectué selon une procédure ouverte ou sélective, internationale. Dans ce cas, il est toutefois possible de déroger à cette procédure pour une partie des travaux grâce à la clause dite de minimis qui permet, pour des travaux inférieurs à deux millions chacun et dont le montant cumulé ne dépasse pas les 20% du total, de procéder selon le cadre fixé pour les marchés non soumis aux accords internationaux.

Pour les marchés non soumis aux accords internationaux et lors du recours à la clause de minimis, la procédure minimale à respecter est définie par la valeur de chacun des travaux.

On distingue quatre types de procédures :

  • La procédure ouverte, qui est un appel d’offres public, publié sur la plateforme SIMAP, auquel tout soumissionnaire peut présenter une offre.
  • La procédure sélective qui se déroule en deux temps. Les soumissionnaires déposent une candidature et l’adjudicateur autorise ceux qui, selon leur aptitude, sont autorisés à déposer une offre, tout en veillant à garantir une concurrence efficace (au minimum 3).
  • La procédure sur invitation qui permet à l’adjudicateur de choisir les soumissionnaires (si possible au moins trois).
  • La procédure de gré-à-gré, dans laquelle l’adjudicateur adjuge un marché directement à un prestataire sans lancer d’appel d’offres. Des offres comparatives peuvent néanmoins être demandées et la négociation est autorisée.


Quelles sont les exceptions ?
La LMP et l’AIMP ne s’appliquent pas à toute une série de marchés présentant des caractéristiques particulières. Pour ce qui est de la construction on relève en particulier que les procédures de marchés publics fixées ne s’appliquent pas :

  • Lorsque l’adjudicateur peut offrir la prestation par ses propres services (in house).
  • Lorsque l’adjudicateur recourt à un soumissionnaire sur lequel il exerce un pouvoir de contrôle et qui agit essentiellement pour lui (quasi in house).
  • Lorsque l’adjudicateur recours à des prestations d’une autre entité publique qui n’agit que rarement pour des privés (in state).

Ces exceptions permettent par exemple à l’adjudicateur de sortir l’achat du bois du marché en le fournissant de ses propres forêts ou par l’intermédiaire d’un groupement forestier auquel il est affilié.


Quelles sont les nouveautés ?
En plus de l’harmonisation de la LMP et de l’AIMP, cette actualisation apporte des nouveautés qui ouvrent plus de possibilités de pilotage des appels d’offres à l’adjudicateur. On parle même de changement de culture dans la nouvelle recommandation « KBOB - achats durables dans la construction 2021/3 » qui dit : « Les services adjudicateurs sont invités à inscrire davantage de critères d’adjudication fondés sur la qualité et la durabilité dans les documents de leurs appels d’offres. Partant, les marchés ne devraient plus être adjugés au soumissionnaire ayant soumis l’offre la plus avantageuse économiquement, mais à celui qui a présenté l’offre la plus avantageuse ».

L’offre la plus avantageuse étant déterminée à l’aide de plus de critères et selon une pondération choisie préalablement par l’adjudicateur, celui-ci peut donc favoriser les éléments qualitatifs qu’il juge prioritaires. Ceci constitue une opportunité pour les entreprises régionales qui peuvent faire valoir leurs atouts dans le domaine du développement durable qui englobe les aspects économiques (coût du cycle de vie), sociaux (protection des employés) et environnementaux (impact du circuit court, par exemple faible émission de CO2 pour le transport).

Des comparateurs de bilans écologiques pour la construction en bois, les portes et les fenêtres sont désormais disponibles. Etabli par la KBOB, l’OFEV et Lignum ils permettent d’apporter la preuve de l’efficacité environnementale des solutions bois. D’autres critères tels que la qualité, l’innovation, la plausibilité des offres ou la fiabilité du prix, sont autant de possibilités pour les entreprises régionales de faire valoir leurs compétences face à la concurrence étrangère plus agressive sur le prix.


Quelques conseils
Selon l’adage, une entreprise avertie en vaut deux. Se préparer avant d’être sollicité est essentiel pour positionner son offre avant même la considération du prix. Pour ce faire on ne peut que recommander de :

  • S’informer et de se former aux procédures, par exemple en parcourant les différents sites proposés ci-après.
  • Se préparer aux questions générales, d’ordre social et de durabilité pour répondre aux critères de notation de l’appel d’offres. Par exemple en établissant une procédure et des documents relatifs à la gestion de ces questions dans l’entreprise ou sur les chantiers. Cela pourrait être, par exemple, de définir un-e responsable environnement dans l’organigramme, d’organiser et de documenter la gestion du recyclage et des déchets en entreprise et sur chantier, de promouvoir les engagements en qualité d’entreprise formatrice, etc.
  • De réfléchir en amont aux collaborations possibles avec d’autres entreprises afin de permettre une participation à des appels d’offres qui seraient trop importants pour une PME seule, les marchés publics étant par définition généralement importants. Prendre les contacts préalablement en prévision, réfléchir aux complémentarités et à l’organisation d’un marché éventuel, sont autant d’éléments qui permettront, le moment venu, de se concentrer sur le coeur de l’offre.
 
Valeurs-seuils en CHF selon les dispositions des traités internationaux
Procédure Fournitures Services Construction
ouverte/sélective ≥ 350'000.- ≥ 350'000.- ≥ 8'700'000.-
 
Valeurs-seuils en CHF et procédures applicables aux marchés non soumis aux traités internationaux
* Pour les cantons ayant adhéré à l'AIMP révisé (AIMP 2019), c'est la mention < 150'000.- qui est valable.
Procédure Fournitures Services Construction  
      Second œuvre Gros œuvre
de gré à gré < 100'000.- * < 150'000.- < 150'000.- < 300'000.-
sur invitation < 250'000.- < 250'000.- < 250'000.- < 500'000.-
ouverte/sélective ≥ 250'000.- ≥ 250'000.- ≥ 250'000.- ≥ 500'000.-