Lignum Holzwirtschaft Schweiz

Protection contre le bruit dans les bâtiments

La construction de bâtiments multi-étages en bois a connu un développement marqué ces dernières années, plaçant les concepteurs face à de nouveaux défis en matière d'isolation phonique. La protection contre le bruit à l'intérieur du logement n'était pas très importante, à une époque où les bâtiments en bois étaient essentiellement des maisons individuelles. Or, aujourd'hui, où les constructions en bois de plusieurs étages abritent de nombreux logements, il convient d'assurer la protection contre le bruit entre les différentes unités.

 

Principes d’isolation phonique

Les nuisances sonores sont les bruits qui gênent votre quotidien. On distingue les bruits aériens – ondes sonores qui se propagent dans l’air – des bruits solidiens – bruit pro-venant d’un choc direct ou qui se propage par vibration de la matière.

Il existe deux grands principes pour limiter la propagation du bruit entre deux espaces, la loi de masse et la loi masse-ressort-masse (voir encadré).

Valeurs limites et basses fréquences

La SIA 181 permet de déterminer les exi-gences minimales vis-à-vis du bruit aérien extérieur, intérieur et face au bruit de choc. Des tableaux dédiés permettent, selon la sensibilité au bruit d’une zone réceptrice et le degré de nuisance d’une zone source, de préciser les limites en dB à atteindre pour les valeurs de projet.

Dans le cadre du projet « Perception subjec-tive du bruit », encadré par Lignum et sou-tenu par l’Office fédéral du logement, une enquête de grande ampleur a été menée auprès de personnes vivant dans des mai-sons individuelles ou des logements locatifs construits en bois, et des mesures et enre-gistrements ont été faits sur des projets réels de construction en bois et en laboratoire sur des systèmes de planchers standards en bois et en béton. Si l’on se base sur les sondages et le nombre de réclamations, même lorsque les valeurs normatives sont respectées, le bruit le plus dérangeant pour les bâtiments de construction légère est la transmission des bruits de choc. Ce bruit sourd est essen-tiellement provoqué par les pas des occu-pants de l’étage supérieur. Ces émissions de bruit caractéristiques à l’intérieur d’un immeuble sont de très basse fréquence, et leurs principales composantes sonores sont inférieures à 100 Hz. Or, en Suisse, les exigences techniques en matière d’isolation phonique sont réglées par la norme SIA 181 « Protection contre le bruit dans le bâtiment » et les indices exigés portent principalement sur la gamme de fréquences entre 100 et 3150 Hz.

Ainsi, sur la base des études menées, Lignum recommande, pour obtenir des prévisions valables de la gêne ressentie par les occupants d’un immeuble, de tenir compte des basses fréquences des bruits de choc. C’est ainsi que les coefficients d’adaptation du spectre adéquats à la prise en compte des basses fréquences sont disponibles dans la base de données Lignumdata qui regroupe près de 900 variantes de compositions d’éléments en bois (planchers, parois, toitures).

www.lignumdata.ch

  • La base de données développées en premier lieu pour les valeurs acoustiques est enrichie en continu pour constituer une base de données intégrant les produits, les composants et les essences de bois.
  • Pour la partie acoustique, cette base de données permet de vérifier les caractéristiques d’une solution en quelques clics, d’ajouter la prise en compte des basses fréquences, d’affiner la conception de certains éléments.
  • La figure 2 présente plusieurs compositions de planchers avec sous face en bois apparente, adaptées pour des plan-chers séparatifs entre logements (REI60) et aussi vis-à-vis des basses fréquences avec le cas échéant les mesures sup-plémentaires à mettre en œuvre pour atteindre cette exigence.

Conception globale

L’isolation phonique d’un bâtiment est une mission qui nécessite une certaine expertise. Chaque détail doit être pris en compte lors de la phase de conception, tant sur le plan des matériaux choisis que des techniques constructives ou de la mise en œuvre. La qualité acoustique d’un élément construc-tif ne dépend pas seulement de ses carac-téristiques propres. Chaque composant (menuiseries, interrupteurs, entrée d’air), chaque raccord (appuis de dalle, raccord en façade sur mur de refend), chaque percement peut influer sur la performance globale du bâtiment. Les jonctions et la réalisation des joints sont des points cruciaux à traiter. Ainsi, la documentation Lignum « Protection contre le bruit dans la construction en bois : Bases, conception et mise en œuvre », qui sera syn-thétisée dans un Lignatec à paraître prochai-nement, est un très bon outil pour contrôler une composition, un détail technique ou choisir un système de liaison adéquat.

Cet ouvrage disponible sur le shop Lignum en allemand, ou en français sous forme de e-book, donne un bon aperçu des dif-férentes méthodes de calcul pour les dif-férentes transmissions du son pour les constructions bois actuelles, et présente des mesures constructives appropriées pour des constructions de planchers en bois performants sur le plan acoustique, en tenant compte des transmissions indirectes et des basses fréquences importantes pour la perception subjective. 

La dernière étape, mais néanmoins impor-tante, de la conception des mesures de pro-tection contre le bruit est la vérification finale de l’interaction entre les mesures prévues. Il peut y avoir un potentiel d’économie et d’op-timisation. Il faut donc vérifier si l’isolation contre les bruits aériens et les bruits de choc est équilibrée pour la transmission directe et la transmission latérale aux jonctions des éléments de construction. Si des voies de transmission présentent un isolement acous-tique nettement plus élevé que les autres, cela peut indiquer que les mesures prévues à cet endroit ne sont pas absolument néces-saires. Les mesures de protection contre le bruit prévues pour ces voies de transmission doivent être alors vérifiées. 

Les bonnes pratiques

Le bois étant un matériau léger et rigide, il transmet plus facilement les vibrations, notamment en ce qui concerne les bruits d’impact. Pour pallier cela, certaines solu-tions sont régulièrement utilisées en Suisse :

  • Dissociation des éléments : La séparation des éléments structurels permet de limiter la transmission des vibrations. Cela inclut l’usage de complexe de sol, où la chape est isolée du plancher structurel par une couche isolante avec une raideur dynamique adaptée.
  • Usage de matériaux absorbants : L’uti-lisation de matériaux comme la laine minérale ou d’autres isolants acous-tiques dans les cloisons et planchers réduit significativement la transmission des sons aériens et d’impact. De même, particulièrement en plancher, l’ajout de granulats permet d’augmenter la masse sans augmenter la rigidité, réduisant ainsi les bruits de basses fréquences (voir tableau figure 2)
  • Double paroi, deux masses découplées : Les parois doubles, où deux parois sont séparées par une couche d’air ou de matériau isolant assumant la fonction de ressort, sont couramment utilisées pour améliorer l’isolation phonique entre les locaux.
  • Joint acoustique ou dispositif de découplage : Des joints élastiques entre les différents éléments de la structure (parois, planchers, faux plafonds, doublages d’installation) font office de ressort, absorbent les mouvements et dissipent l’énergie. Ils permettent de limiter la transmission des vibrations et sont surtout utiles dans les constructions massives en bois. 

Il convient également de relever que la constitution des planchers et leur transmission des bruits d’impact ont une influence toute particulière. En effet un complexe de sol performant permet de réduire de manière notable également les transmissions dites latérales, notamment aux parois périphé-riques (voir figure 4).

Conclusion

Pour qu’un immeuble soit performant en ce qui concerne la protection contre le bruit, il faut tenir compte dans toutes les phases du projet des facteurs d’influence importants pour l’acoustique du bâtiment.

De l’adaptation des exigences en matière d’isolement acoustique aux besoins des utilisateurs, en passant par le concept de protection contre le bruit et la planification de la construction jusqu’à la réalisation des travaux, les mesures nécessaires de protec-tion contre le bruit doivent être coordonnées avec tous les acteurs du projet. Les mesures de protection contre le bruit prévues doivent être intégrées dans les plans d’exécution et les documents d’appel d’offres, être prises en compte par l’entrepreneur dans son offre et considérées par le maître d’ouvrage lors de l’adjudication. Il faut notamment tenir compte de la composition nécessaire des éléments de construction, des propriétés des matériaux et de la configuration des détails. 

Lors de la réalisation, l’entrepreneur doit respecter les directives de conception et mettre en œuvre les mesures de protection contre le bruit requises dans les règles de l’art. L’exécution des travaux doit être supervisée régulièrement par la direction des travaux. Des tests in situ de la construction après l’achèvement des travaux/avant l’occupa-tion du bâtiment constituent une mesure supplémentaire d’assurance qualité. Alors que les mesures d’assainissement peuvent se révéler couteuses, si les aspects de l’iso-lement phonique sont pris en compte assez tôt dans la conception et réalisé de manière adéquate, les mesures de protection contre le bruit ne conduisent pas à des surcoûts importants et peuvent être mise en œuvre sur le chantier de manière rationnelle. 

 

Texte : Lucie Mérigeaux et Denis Pflug, CEDOTEC

 

La loi de masse

Selon cette loi, plus un matériau est lourd, plus il isole, particulièrement des bruits aériens (les ondes de l’air ont plus de difficulté à faire vibrer un élément lourd qu’un élément léger). Pour les éléments de construction homogènes, l’augmentation de la masse est donc le moyen le plus évident d’amélio-rer l’isolation acoustique. La masse a moins d’effet sur les bruits de chocs. Néanmoins, il n’est pas suffisant de se baser uniquement sur cette relation : à cause de la rigidité de la paroi, il se produit en effet à une certaine fréquence (fréquence critique de coïnci-dence) une chute de l’isolement acoustique.

La loi masse-ressort-masse

Dans la construction en bois, les parois pré-sentent un poids réduit par rapport aux élé-ments en béton ou en maçonnerie. Grâce à la loi masse-ressort-masse, chaque matériau, par ses propriétés physiques et sa masse, absorbe une partie de ces ondes et des valeurs d’isolation acoustique équivalentes sont obtenue avec des masses notablement inférieures. La création d’un complexe de couches hétérogènes successives est donc particulièrement efficace pour agir sur toutes les fréquences du son.