Lignum Holzwirtschaft Schweiz

Les sols forestiers suisses peuvent stocker autant d’eau que le lac de Walenstadt

L'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL a calculé pour la première fois la disponibilité de l'eau pour les arbres dans les sols forestiers suisses. Elle équivaut le volume du lac de Walenstadt et est stockée dans les deux premiers mètres de sol. Leur modèle permet également de mettre en évidence la gravité des sécheresses passées et actuelles pour la forêt.

Plusieurs hêtres de la forêt de Hardwald près de Bâle ne se sont pas remis de la sécheresse de 2018. Photo : août 2020
Image : Beate Kittl, WSL


Lors de l'été sec de 2018, le feuillage de nombreux arbres de la forêt suisse a changé de couleur prématurément ou est même tombé complètement. Entre-temps, il existe de nombreuses études sur la manière dont les plantes réagissent à de tels événements extrêmes. Mais ce qui se passe au niveau du régime hydrique du sol est resté dans l’ombre jusqu’à présent. du sol est resté dans l'ombre jusqu'à présent. Pour la première fois, une équipe de recherche du WSL a pu estimer les réserves d'eau du sol dans la forêt suisse, c'est-à-dire où et combien d'eau est disponible pour les plantes. Les sécheresses extrêmes de 2015 et 2018 ont ainsi pu être analysées plus précisément.

Les scientifiques ont intégré les données d'un réseau de 44 stations de mesure de l'humidité du sol installées dans toute la Suisse dans un modèle de calcul dynamique capable de calculer tous les flux d'eau entre le sol, les plantes et l'atmosphère. "Il peut montrer comment les réservoirs d'eau du sol se remplissent et se vident en fonction des conditions météorologiques et de la consommation par les plantes", explique Katrin Meusburger, hydrologue au WSL et première auteure d'un article spécialisé dans Global Change Biology.

La forêt n'est pas un voleur d'eau
Si l'on se représente la capacité maximale de stockage de l'eau des forêts jusqu'à deux mètres de profondeur comme un seau, le seau entier peut contenir à peu près le volume d'eau du lac de Walenstadt. Les quantités sont toutefois réparties de manière très inégale dans toute la Suisse ; elles varient d'un facteur dix entre les sites où la disponibilité en eau est la plus faible et ceux où elle est la plus élevée. La profondeur des racines des plantes a également une influence. Ce facteur a été intégré dans le modèle de calcul grâce aux nouvelles données de mesure du WSL.

L'un des objectifs de l'étude était d'estimer la consommation d'eau des arbres lors des étés secs de 2015 et 2018. "On pourrait penser que l'évaporation en forêt a aggravé les faibles niveaux d'eau dans les cours d'eau ou les nappes phréatiques. Mais ce n'est pas le cas", explique la chercheuse. Les arbres ont réduit drastiquement leur évaporation (transpiration), de 23 pour cent (2015) et de 28 pour cent (2018) respectivement. En cas de sécheresse, les arbres ferment les pores de leurs feuilles et de leurs aiguilles, par lesquels ils absorbent du CO2 pour la photosynthèse, mais perdent aussi de l'eau. Cela se fait au détriment de la croissance. Ainsi, en fin de compte, la transpiration des arbres forestiers suisses n'a pas fait perdre plus d'eau que les autres années.

2018 a été pire que 2015
Si les arbres passent en mode économique, les chercheurs parlent de déficit de transpiration. Le nouveau modèle permet de calculer ce paramètre. "Nous pouvons chiffrer l'ampleur de la sécheresse du point de vue de la plante et également la prédire", précise Katrin Meusburger. "Du point de vue des plantes, la sécheresse de 2018 a été pire que celle de 2015". La période de pénurie d'eau a duré de juillet à octobre, alors qu'en 2015, seuls les mois de juillet et août étaient critiques.

La disponibilité de l'eau dans le sol simulée par le modèle permet de mieux prédire l’apparition d’une coloration précoce des feuilles (comme celle qu’on avait observé en 2018), même mieux que si seules les données météorologiques étaient considérées. Le nouveau modèle complète donc parfaitement le réseau SwissSPOT existant ainsi que le réseau Treenet, deux projets du WSL qui mesurent le stress hydrique actuel du sol et des arbres forestiers.

La résponsable du projet souhaite développer le modèle de manière à ce qu'à l'avenir, les forestiers puissent s'informer sur la taille et le niveau de remplissage du réservoir d'eau du sol dans leurs forêts. "Nous pouvons mettre en évidence le stress invisible dû à la sécheresse avant même que le seuil de flétrissement ou de chute des feuilles des arbres ne soit franchi", commente Katrin Meusburger. Pour ce faire, elle souhaite augmenter la résolution spatiale des cartes modélisées de 500 mètres actuellement à 25 mètres. Les forestiers seraient ainsi avertis si leurs peuplements étaient affaiblis par la sécheresse, ce qui pourrait entraîner des ruptures de branches, des chablis lors de tempêtes et des attaques de champignons ou d'insectes.

Lien www.wsl.ch